Guide des formalités
Demande d'ouverture d'une procédure de sauvegarde
La procédure de sauvegarde a été la principale innovation de la loi du 26 juillet 2005 (v. les articles L. 620-1 et suivants ; R. 621-1 et s. du code de commerce).
À l'instar du mandat ad hoc et de la conciliation, seul le chef d'entreprise peut en demander la mise en oeuvre ; à l'inverse, il s'agit d'une procédure collective dans la mesure où son ouverture arrête les poursuites des créanciers antérieurs et fait l'objet de mesures de publicité légale. C'est une procédure préventive, puisqu'elle implique que l'entreprise NE SOIT PAS EN ÉTAT DE CESSATION DES PAIEMENTS (toutefois, pour la sauvegarde accélérée et la sauvegarde financière accélérée : l'entreprise ne doit pas être en cessation des paiements depuis plus de 45 jours ; art. L. 628-1 al. 4 et, le cas échéant, L. 628-9 du code de commerce). Le chef d'entreprise doit cependant rencontrer des difficultés qu'il ne peut surmonter seul.
Afin d'inciter le chef d'entreprise à agir avant que la situation ne soit compromise, le législateur a donc instauré de nouvelles règles en 2005, modifiées ensuite notamment par les ordonnances n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 et n° 2014-326 du 12 mars 2014.
Intérêt de solliciter le bénéfice de la sauvegarde
Le dirigeant reste maître de son entreprise
L'administration de l'entreprise demeure assurée par son dirigeant (article L. 622-1 alinéa 1 du code de commerce), la rémunération de celui-ci a vocation à être maintenue, il peut céder ses parts sociales ou titres, et conserver son courrier.
Un administrateur judiciaire peut être désigné par le Tribunal, sachant que sa désignation sera obligatoire lorsque l'un de ces seuils est atteint :
- le chiffre d'affaires est supérieur ou égal à 3 000 000 euros hors taxes ;
- le nombre de salariés est supérieur ou égal à 20.
Si un administrateur est désigné, il ne pourra que surveiller ou assister le débiteur, mais ce dernier ne sera jamais dessaisi de sa gestion. A noter toutefois qu'en cas de mission d'assistance de l'administrateur, il y aura une cogestion de l'entreprise. L'ordonnance précitée du 18 décembre 2008 a introduit pour le débiteur la possibilité de proposer au tribunal la désignation de l'administrateur judiciaire de son choix (article L. 621-4 du code de commerce), et celle de procéder lui-même à l'inventaire de son patrimoine (sous réserve que celui-ci soit certifié par un commissaire aux comptes ou attesté par un expert-comptable ; art. L. 622-6-1 du code de commerce).
Le tribunal de commerce dans son jugement va ouvrir la période d'observation pour une durée maximale de 6 mois, sous réserve d'une prolongation le tout pour une durée qui ne peut excéder 18 mois. A l'issue de cette période d'observation un plan de sauvegarde est présenté par le débiteur, avec ou sans le concours de l'administrateur. Le tribunal décidera alors d'adopter le plan proposé s'il existe une possibilité sérieuse pour l'entreprise d'être sauvegardée.
À noter deux autres dispositions issues de l'ordonnance de 2008 : tout d'abord, la possibilité pour le débiteur de préparer, avec le concours de l'administrateur, le projet de plan de sauvegarde et de proposer celui-ci aux créanciers (articles L. 626-2 et L. 626-8 du code de commerce) ; ensuite, la suppression de la faculté pour le tribunal de subordonner l'adoption du plan de sauvegarde à l'éviction des dirigeants (abrogation de l'art. L. 626-4 du code de commerce). Désormais, le dirigeant est donc assuré de rester à la tête de son entreprise si un plan de sauvegarde est arrêté.
L'ordonnance du 12 mars 2014 a complété ces modifications en supprimant l'obligation de payer sans délai le cocontractant dont le contrat est poursuivi pendant la période d'observation (art. L. 622-13 modifié C. com.).
Ce texte a, en outre, élargi les passerelles entre la sauvegarde et le redressement judiciaire : dorénavant, à défaut de plan adopté par les comités de créanciers et lorsque la clôture de la procédure conduirait à bref délai à la cessation des paiements, le tribunal peut convertir la procédure de sauvegarde en redressement judiciaire à la demande non seulement du débiteur, mais également des mandataires de justice ou du ministère public.
Par ailleurs, l'ordonnance de 2014 prévoit, alors que le débiteur n'intervenait jusqu'alors que pour le choix de l'administrateur judiciaire, qu'il peut formuler des observations lorsqu'est envisagée la désignation de plusieurs mandataires judiciaires ou plusieurs administrateurs judiciaires, ainsi que lorsque le ministère public propose la désignation d'un ou plusieurs mandataires de justice.
Le dirigeant reste maître de la procédure
Le dirigeant peut demander qu'il soit mis fin à la procédure de sauvegarde dès lors que les difficultés qui ont justifié l'ouverture de la procédure ont disparu.
Lui seul peut demander la cessation partielle de l'activité.
Il peut même demander la conversion de la procédure de sauvegarde en procédure de redressement judiciaire en l'absence de cessation des paiements, ce qui peut lui permettre en pratique d'envisager, à sa propre initiative, un plan de cession.
Autre avantage important à l'égard du chef d'entreprise
Si cette procédure permet à l'entreprise de se mettre sous protection de justice, il en est de même du chef d'entreprise et de ses proches s'ils se sont portés cautions au bénéfice de l'entreprise : les cautions personnes physiques ne peuvent être poursuivies ni durant la période d'observation, ni durant tout le temps de l'exécution du plan de sauvegarde (article L. 626-11 du code de commerce par opposition au redressement judiciaire - article L. 631-20 du code de commerce - où les mêmes personnes ne peuvent pas se pr évaloir du jugement arrêtant le plan de redressement).
Par ailleurs, les intérêts cessent de courir à leur égard à compter du jugement d'ouverture de la sauvegarde.
Conditions d'ouverture
Pour que la procédure de sauvegarde d'une entreprise puisse être prononcée, il est nécessaire que cette dernière ne soit pas en état de cessation des paiements et, simultanément, qu'elle ait la qualité exigée, la juridiction saisie devant statuer en considération de la situation existant au jour où la décision est prononcée.
L'absence d'état de cessation des paiements
La procédure de sauvegarde peut être ouverte sur demande d'un débiteur qui, sans être en cessation des paiements, justifie de difficultés qu'il n'est pas en mesure de surmonter (article L. 620-1 du code de commerce). L'ordonnance du 18 décembre 2008 a supprimé la preuve, à fournir par le débiteur, d'un lien entre ces difficultés insurmontables et la cessation des paiements inéluctable.
La cessation des paiements est l'impossibilité pour le débiteur de faire face au passif exigible avec son actif disponible (article L. 631-1 du code de commerce).
Il faut observer que les textes ne donnent pas de précisions sur la nature des difficultés, mais elles doivent être avérées et non seulement prévisibles, puisque le législateur doit en justifier.
Avec l'ordonnance du 12 mars 2014 est instituée une procédure de sauvegarde accélérée (dont les principes sont inspirés de la procédure de sauvegarde financière accélérée prévue par la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010, de régulation bancaire et financière), qui ne peut être ouverte que si le débiteur que si une procédure de conciliation est en cours à la date de la saisine du tribunal.
Or, la procédure de conciliation est compatible avec un état de cessation des paiements, si celui-ci n'est pas antérieur de plus de 45 jours ; une procédure de sauvegarde accélérée est donc compatible avec l'état de cessation des paiements, contrairement aux dispositions générales de la procédure de sauvegarde.
La cessation des paiements n'est cependant, en tout état de cause, pas une condition d'ouverture de la procédure de sauvegarde accélérée, contrairement à ce qui doit être établi pour les procédures de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire.
La qualité exigée du débiteur
En plus de l'absence d'état de cessation des paiements, la loi exige comme condition d'ouverture de la procédure, que le débiteur ait la qualité de commerçant, d'artisan, de personne morale de droit privé, d'agriculteur, de profession libérale, commerçant ou artisan de fait (article L. 620-2 du code de commerce).
Aux termes de l'article L. 621-2 du code de commerce, c'est le tribunal de commerce qui est compétent lorsque le débiteur est commerçant ou artisan, et le tribunal de grande instance dans les autres cas.
Saisine du tribunal
La demande d'ouverture d'une sauvegarde est faite par le représentant légal de la personne morale ou par le débiteur, personne physique, au greffe du tribunal de commerce compétent territorialement.
Imprimé de demande d'ouverture d'une procédure de sauvegarde pour une personne morale
Imprimé de demande d'ouverture d'une sauvegarde accélérée
Pour les personnes physiques, le tribunal compétent est celui du principal établissement. Si le commerçant n'a pas d'établissement fixe, le tribunal compétent est celui de son immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés, à défaut de son domicile ou de sa résidence.
Pour les personnes morales, la règle est la même que pour les personnes physiques (article R. 600-1 du code de commerce), le tribunal compétent est celui du siège social de la société, à condition qu'il ne soit pas fictif, le tribunal conservant la possibilité de requalifier le siège social en considérant qu'il ne se situe pas au lieu déclaré mais dans le ressort d'une autre juridiction. Afin d'éviter les pratiques de transfert de siège, le tribunal du précédent siège reste compétent en cas de changement de siège de la personne morale dans les six mois qui précèdent la saisine du tribunal. Le délai court à compter de l'inscription au Registre du Commerce et des Sociétés.
Enfin, si le débiteur n'a pas de siège en territoire français, le tribunal compétent est celui du centre principal de ses intérêts en France.
Seul le représentant légal (ou le débiteur personne physique) de la société est habilité à effectuer une demande d'ouverture de procédure de sauvegarde. La demande qui émane d'un gérant de fait, d'un associé ou d'un conjoint collaborateur sera refusée. Cependant, le représentant légal a la possibilité de se faire représenter par la personne de son choix si celle-ci est munie d'un pouvoir.
Cette demande expose la nature des difficultés rencontrées et les raisons pour lesquelles le débiteur n'est pas en mesure de les surmonter. Elle prend la forme d'une requête adressée au tribunal. Lui sont jointes les pièces énumérées par l'article R. 621-1 du Code de Commerce.